La publication des résultats d'Illiad, la maison mère de Free a été l'occasion pour les analystes financier de se pencher sur le cas "Free Mobile". Surprise, dans un secteur des télécoms en crise à cause de la guerre des prix initiée par Free Mobile, l'activité Mobile de Free est non seulement rentable, mais c'est l'opérateur qui a franchi le point le plus rapidement, dans le monde entier. Business Model Expert livre quelques élements d'analyse sur le dessous financiers du modèle "Free Mobile".
10 % de part de marché français, soit 1 milliards d'euros et 7 millions d'abonnés
Point mort atteint au bout de 18 mois (juin 2012) : CA S1 2013 : 550 millions € pour 54 millions d'ebitda (9 % de marge)
Sur le 1er semestre 2013, 35 % à 40 %du trafic des abonnés Free Mobile est écoulé sur le réseau Free mobile en propre et 65 % du trafic sur le réseau Orange.
Prix de l'itiérance avec Orange : 1 milliard € sur 2012-2013
Les conventions en vigueur dans le monde de la téléphonie mobile prévoit qu'un opérateur soit rémunéré à chaque fois que l'un de ses abonnés passe un appel (c'est l'abonné en question qui est facturé), mais aussi pour chaque appel que l'un de ses abonnés reçoit. On parle alors de rémunération pour la terminaison d'appel mobile, rémunérée 1,1 centimes par appel durant la période de lancement, d'un opérateur puis 0,8 centimes d'euros à partir du 18eme mois. Un analyste intérrogé par le quotidien La Tribune le 3 septembre 2013 évaluait que les terminaisons d'appel auraient généré 20 % des 550 millions d'euros de CA (soit 100 millions) de Free Mobile au premier semestre 2013. Ces revenus sont donc essentiels à l'équilibre financier d'un opérateur mobile.
Il est intéressant de s'interroger sur la méthode de calcul utilisée par l'analyste afin de déterminer comment ont été générés ces 100 millions d'euros de CA providentiels.
Déterminons tout d'abord, le nombre de terminaisons d'appel reçus par les abonnés de Free Mobile. Il suffit de divier 100 millions d'euros versés par les autres opérateurs par 0,011 euro. 90 millions d'appels ont donc été reçu sur les six premiers mois 2013 par en moyenne 6 millions d'abonnés sur les 6 mois (en fin de période, Free Mobile comptait 6,72 millions d'abonnés). Chaque abonné a donc reçu en moyenne 1500 appels sur la période de 6 mois, ce qui correspond à environ 9 appels par jour et par abonné. Chaque jour, un abonné qui ne téléphone pas mais reçoit des appels rapporte donc environ 0,1 euro à Free Mobile (9 appels fois 0,011 euro). Chaque année, un abonné rapporte donc, en moyenne, 36 euros à Free Mobile. Cette donnée n'est pas neutre pour évaluer l'intérêt de Free à recruter des abonnés à 2 euros par mois (soit 24 euros par an).
Ceci étant, la somme de 0,011 euros de rémunération par appel entrant correspond au tarif perçus par un opérateur qui se lance. A compter du 1er juillet 2013, les tarifs de terminaisons d'appel de Free Mobile seront revus à la baisse. (ils passent de 0,011 euro à 0,008 euros, soit une baisse de 27 % de cette source de revenus à périmètre constant. Sur le premier semestre 2013, cela aurait représenté un manque à gagner de 27 millions d'euros.
La facturation aux autres opérateurs des terminaisons d'appel est donc un élément central du business model low cost de Free.
Ils permettent à Free de générer du CA direct (les 2€ par mois d'abonnement auxquels s'ajoutent les dépassements) mais aussi de façon indirecte car ils génèrent des appels entrants rapportant 0,8 centime d'euros à chaque appel. Si ces abonnés recoivent 9 appels par jour, ils permettront à Free Mobile de générer 89 millions d'euros de CA indirect en année normal (ie au tarif de 0,008 euros par terminaison d'appel X 3,4 millions d'abonnés à 2 euros X 9 appels par jour X 365 jours) Cela correspondrait à 8,5 % du CA de Free (que l'on peut estimer à 1,1 milliard d'euros pour l'année 2013) et 130 % de son résultat opérationnel (que l'on peut estimer à 70 millions d'euros). Autrement dit, sans ce CA additionnel « passif » de 45 millions € au premier semestre 2013 (soit une demi année), le résultat du premier semestre aurait été de 9 millions d'euros et non de 54 millions. Les abonnés à 2 euros non seulement ont généré un CA direct de 3 millions d'abonnés X 4€ X 6 mois = 72 millions auquel s'ajoutent les 45 millions euros de CA indirect liés à la facturation de la terminaison d'appel mobile.
En réalité, divers recoupements amènent à penser que sur le premier semestre 2013, les abonnés à 2 euros auraient dépensé en moyenne plutôt 4 euros par mois (2 euros correspondant au forfait de 2 euros plus 2 euros de dépassement) tandis que les abonnés normaux (avec les forfaits illimités à 15,99 euros ou 19,99 euros par mois), auraient dépensé en moyenne 20 euros.
Ces différents chiffres permettent de reconstituer la composition du chiffre d'affaires de Free en année normale, dont voici quelques estimations.
On voit donc qu'alors que l'essentiel du CA provient des revenus facturés aux abonnés ordinaires à 15,99 euros ou 19,99 euros par mois (70,5 % du CA), les revenus liés aux abonnés à 2 euros sont essentiels (qui réglent l'équivalent de 14,1 % du CA et qui génèrent via les terminaisons d'appel 7,7 % du CA).
Un analyste précisait lors de la publication des résultats du premier semestre 2013, que Free Mobile avait l'opérateur qui avait atteint le point mort dans un délai inédit. On peut imaginer que l'explication repose sur trois points : une offre extrêmement attractive qui à déclenché un fort bouche à oreille.
Redevance itiérance Orange : 500 millions d'euros
Abonnés 2 euros | Abonnés normaux | |
CA issu des terminaisons d'appel | ||
Abonnés | 3 400 000 | 3 400 000 |
Appels reçus (par jour par abonné) | 9 | 9 |
Appels reçus (par année, par abonné) | 3285 | 3285 |
Tarif terminaisons appel par abonné | 0,008 € | 0,01 € |
Refacturations terminaisons d'appel | 26,28 € | 26,28 € |
Total CA terminaisons d'appel | 89 352 000 € | 89 352 000 € |
Part CA Total | 7,72% | 7,72% |
CA issu des abonnements | ||
Montant moyen mensuels facturé | 4 € | 20 € |
Revenus abonnements | 163 200 000 € | 816 000 000 € |
Part du CA abonnements | 16,67% | 83,33% |
Part du CA total | 14,09% | 70,47% |
Revenus totaux | 252 552 000 € | 905 352 000 € |
Part du CA total | 21,81% | 78,19% |
CA global | 1 157 904 000 € |
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